Portrait au crayon, par George Sand (vers 1847) |
De nombreux livres et pages internet ont été écrits sur Chopin. J'en ai lus certains (ma passion pour son œuvre étant de notoriété pour le moins familial, mes parents n'avaient pas à chercher très loin pour mes cadeaux d'anniversaires...). L'image que je me suis forgée du compositeur est le fruit du mariage de ces lectures et de mes impressions personnelles nées d'une intimité quasi quotidienne avec son œuvre.
Chopin, avant d'être compositeur, était pianiste. Il a d'ailleurs composé presque uniquement pour le piano. Ses formes musicales sont donc directement issues du parcours de ses doigts sur un clavier. Chopin était très bon improvisateur et sa musique en témoigne sans aucun doute. Il a eu ce très grand talent qui consiste à allier la spontanéité avec des formes intellectuellement structurées. En effet, bien que sa musique donne une réelle impression de fraîche spontanéité, si on en analyse la structure, on découvre une logique très élaborée, inspirée notamment du contrepoint tel que le pratiquait J.-S. Bach. Ce dernier est d'ailleurs connu pour être un des rares compositeurs de musique pour clavier que Chopin appréciait (il a composé son cahier des 24 préludes OP. 28 en hommage à Bach).
Le premier professeur de piano de Chopin (Wojciech Żywny) était... violoniste. Le compositeur a donc sûrement eu une liberté dans l'apprentissage de la technique pianistique, liberté dont témoigne son écriture musicale. Echappant ainsi au moule rigide qu'aurait pu lui imposer un professeur ayant des principes précis quant au doigté, à la position des mains, etc., il écrira des pièces qui imposent des doigtés révolutionnaires pour son époque (un critique de l'époque déconseillera même de jouer sa première Etude de concert OP. 10 sans la présence d'un chirurgien) mais pratiqués couramment depuis. Cette liberté de la main est une part non négligeable de son héritage et constitue en soi tout un enseignement. De fait, l'étude académique du piano n'obtenait de sa part que railleries et moqueries. Il excellait d'ailleurs en privé dans l'art de l'humour parodique et de la caricature mimée.
Chopin s'est également arrangé pour introduire dans presque chacun de ses morceaux au moins une difficulté technique qui le rende quasiment injouable pour un non-virtuose, garantissant ainsi à ses compositions d'être épargnées pas les élèves des conservatoires. Plus tard, il commença quand même l'écriture d'une Méthode des méthodes du piano qu'il n'acheva jamais. Tant pis, ou tant mieux... Bien mieux qu'un cours didactique, un enseignement initiatique se cache entre les portées de sa musique. Que celui qui a des yeux pour voir, voie...
Mais Chopin, avant d'être pianiste ou compositeur génial, était être humain. Un être humain d'une grande sensibilité. Sa musique, tel un chant qui s'élève des profondeurs de notre cœur, nous emporte loin de nos petites préoccupations mercantiles. Il nous parle d'amour, de vie et de mort et peut paraître un peu trop grave ou triste à ceux qui ont envie d'éluder les questions par trop existentielles. Mais pour les autres, ce chant ramène à l'essentiel et devient vite un compagnon sur le chemin de la vie. Bref, on aime ou on n'aime pas, mais on reste rarement indifférent.